When surrounded by war, one must eventually choose a side - Sek'nos

La prison semblait aujourd’hui aussi proche que lointaine depuis que Kei en avait été extraite. Jugée suffisamment coopérative pour sortir, le deal avait été de fournir des informations capitales aux rebelles afin de leur permettre de continuer la Lutte, la seule qui compte aujourd’hui. Bien sûr, cela avait été son propre frère qu’elle n’avait pas vu depuis des années qui avait mené ce tête à tête. Se retrouver ainsi, à une place inférieure, la peur qui tord le ventre, ce n’était pas ce que Kei avait imaginé pour son avenir glorieux. Pourtant, rien ne pouvait rivaliser avec la paix qu’elle gagnait petit à petit pour faire enfin la bonne chose. Heela avait raison, la Jedi l’avait sauvé du désespoir et de la mort et lui avait permis de lutter pour une cause juste. Cela faisait longtemps que Kei ne croyait plus aux beaux principes de l’Empire. Comment penser autrement quand le régime qui promets la paix dans la Galaxie ne cause que douleur et morts sur son sillage ?

Depuis quelques semaines, on lui avait donné un travail à effectuer. Enfin...travail était un bien grand mot car malgré les informations fournies, Kei se retrouve aujourd’hui à travailler pour les archives de l’Intelligence. Classer, ranger, organiser, c’était son quotidien désormais. Même si ce job facile s'était révélé au départ cathartique, aujourd’hui l’ancienne générale s'ennuie d’être tenue bien loin des opérations. On ne la tenait pas au courant, sûrement par manque de confiance encore, mais elle était retournée à un statut de bleu qui ne lui convenait guère. Kei avait gagné son succès, avait grimpé la hiérarchie, avec sa tête et son ambition, cela lui était intolérable de ne rien faire d’utile. Bien sûr, dans ces projets, on lui avait plusieurs fois émit l’idée que la jeune femme mettrait surement ses compétences en psychologie en service mais on ne l’a jugé pas encore assez stable pour effectuer ce travail. Se confronter aux conséquences de son ancien régime n’allait clairement pas faire du bien à sa propre santé mentale. De plus, bon nombre de rebelles étaient encore méfiants quand à sa venue sur la base, jugeant clairement qu’elle était une faille de sécurité.

Heureusement, les moments passés seule avec Heela lui faisaient du bien. La Jedi était souvent disponible pour elle, malgré toutes ses obligations, toujours la guidant et faisant en sorte qu’elle se sente ici, chez elle. Leur relation s'améliore de jour en jour et Kei ne pouvait plus nier les sentiments qui la prenait quand la Jedi lui souriait. Stupide émotion inutile qui gonflait son coeur d’un amour qu’elle n’aurait jamais pensé ressentir.
Perdue dans ses pensées, il était clairement l’heure d’une pose bien méritée et surtout d’un bon café noir sans sucre pour lui redonner un coup de fouet. Kei aimait travailler d’arrache pied, jusqu’à tard le soir, cela lui permettait de ne pas se reposer sur des pensées qu’elle jugeait obsolète. La salle n’était pas bien pleine quand elle entra mais elle entendit déjà les rires et les conversations de quelques travailleurs qui s'octroient également une pause bien méritée. Kei se sentait toujours mal à l’aise au milieu de cet environnement. Elle peinait à s’approcher des gens, ne leur faisant pas confiance tout autant qu’ils la tolérait à peine. Évitant leur regard, redressant les épaules, elle marcha droit vers la machine à café afin de commander son du.

Cependant elle ne perçut pas la silhouette devant elle qui lui coupa clairement le chemin.

- Ne serait-ce pas la traître qui montre sa tête ? Alors, racaille impériale, comment tu te sens entourée des familles de tes victimes ? Aucun remord j’imagine ? On sait que tu espionnes, traître.

Kei releva la tête afin de fixer son regard dédaigneux sur l’homme qui lui faisait face. un de ses cafards un peu trop impétueux qui osaient aller à l'encontre des ordres de la générale. Un petit con insignifiant qui pourtant participe à sa mise à l’écart et à son sentiment de malaise.

- Bouge de mon chemin Satho, je m'étonne encore qu’un flyboy comme toi arrive encore à faire une phrase complète. Tu as sûrement mieux à faire et moi aussi alors juste...dégage.

Ce n’était surement pas la meilleur punchline que l’ancienne générale avait sous le coude et clairement insulter ses camarades n’étaient pas non plus notés comme une bonne attitude mais les tensions sous jacente, Kei n’en pouvait plus. Elle voulait juste pulvériser le nez de son adversaire pour lui faire comprendre qu’elle n’avait pas obtenu son rang pour rien et qu'elle n’était pas une pauvre traître sans détresse. La remarque piqua certainement le pilote moqueur qui gonfla soudainement les poings, prêt sûrement à dégainer sa violence comme un homme sans cervelle savait le faire. Le corps de Kei se tendit davantage, prête à répliquer même si clairement, elle aurait juste souhaité boire son café en paix et repartir dans son sous-sol poussiéreux, à trier des datapads obsolètes.

Il y avait des jours, lorsque la porte de ses quartiers s'ouvrait, où ce blanc immaculé lui sautait au visage. Des jours où son regard ne pouvait lutter et où la retraite stratégique devait être décrétée dès la première seconde pour récupérer ses lunettes sombres avant de se jeter dans ce bain de lumière.

Au cœur du pouls battant de la base il y avait toujours une relative effervescence. Les écrans scintillaient de leurs informations, les corps et les boulons se mouvaient, guidés par leurs objectifs respectifs, formant un ballet dont il usait parfois pour réfléchir. Assis devant sa table tactique, Sek'nos recevait les dernières informations, amassant les données tel un droïde archiviste pour dispenser les conclusions que l'on exigeait de lui. Il n'était aujourd'hui qu'un esprit affûté dans un corps qu'il prenait tout de même soin de décrasser et d’entretenir tous les matins.

▬ " Ednea " La silhouette s'était dépliée, remise sur ses pieds avant de calmement interpeller la jeune femme qui se tourna aussitôt vers lui. " Pouvez-vous me traiter le dernier rapport s'il vous plaît. " La demoiselle acquiesça avant de poser son regard sombre sur la tasse qu'il tenait et de se figer. " Je suis désolée, je peux y aller tout de suite... " Sek'nos leva sa main libre en signe d'apaisement, accompagnant le geste d'un fin sourire. " Je vais y aller, j'ai besoin de marcher. " Visiblement embarrassée, il sentit le regard de son interlocutrice dans son dos, traditionnellement c'était elle qui se rendait à la cuisine à cette heure pour lui ramener une de ces infusions exécrables qui éclaircissaient ses maux et son esprit. Mais les traditions n'étaient pas faites pour être éternelles et notre homme se plaisait à changer d’atmosphère quelques instants.

C'est en traînant dans son sillage l'amorce d'un mal de crâne et mille pistes de réflexions que Sek'nos atteint finalement la cuisine. Comme à son habitude, notre homme se glissa dans l'ambiance discrètement, mêlant sachets et eau chaude avant d'aller s'asseoir dans un coin en attendant que l'odeur de sa mixture lui pique le nez. Derrière les carreaux opacifiant de ses lunettes, il était difficile de savoir où son regard se portait véritablement, mais à cet instant précis notre maître de guerre ne profitait guère de cet avantage, peu intéressé par les bruits de couloirs qui pouvait animer le lieu.

▬ " Ne serait-ce pas la traître qui montre sa tête ? [...] On sait que tu espionnes, traître. " Son manque d'intérêt ne le rendait pas sourd pour autant et cette voix identifiable le tira de ses réflexions tant par son ton que par ses mots. Sek'nos releva donc son nez du nuage épicé qui commençait à se former au-dessus de sa tasse et jaugea la silhouette du pilote devant lequel il pouvait deviner un autre individu.

▬ " Bouge de mon chemin Satho, [...] dégage. " Les corps se tendaient, l'atmosphère autour du duo s’électrisait, attisant le morbide intérêt des spectateurs. Comme s'il n'y avait pas mieux à faire que de s'en prendre à la première image plus ou moins ressemblante de l'ennemi... Demeurant assit, Sek'nos se redressa, observant le mur face à lui.

▬ " Par curiosité, quelle partie de notre jugement remettez-vous en cause pilote ? " De l'ombre à la lumière, le maître de guerre semblait savoir tout aussi bien user de discrétion comme de présence, basculant les attentions sur sa présence, forçant le hardi moussaillon à pivoter pour vérifier l'identité du nouveau venu dans cette danse. " Que nous puissions ne pas reproduire cette horrible erreur... " Son visage se tourna, posant son regard sur l'individu avant d'abaisser ses lunettes pour laisser à l'homme le soin de comprendre que ce regard aux iris jaunes le regardait bien lui.

▬ " Ce n'est pas ce que je voulais dire commandant... " Étrangement, les attentions des spectateurs se faisaient moins oppressantes, chacun se rappelant progressivement qu'ils avaient autre chose à faire que chanter des messes basses. Sek'nos, lui, remit ses lunettes correctement avec un fin sourire.

▬ " J'entends bien. " Il n'était pas forcément évident de définir si l'homme se retrouvait coincer par le respect qu'il devait ou avait pour son interlocuteur ou s'il était en passe de véritablement comprendre le message. Dans les deux cas il n'avait plus envie de jouer de la provocation et c'était le point recherché par cette intervention. " Si cela devait se reproduire pour vous ou un de vos collègues, j'exige que ces doutes me soient transmis à moi plutôt qu'à l'intéressé. " L’acquiescement qu'il obtint sembla lui suffir car notre homme s'en retourna vers sa tasse, fermant ses paupières pour apaiser la douleur lancinante qu'il avait si bravement provoqué par cette attaque de luminosité. " Vous pouvez disposer. " Il n'observa pas la retraite de l'individu, préférant ne pas s'accrocher à la manière dont laquelle il avait traité cette intervention et décida de boire la première gorgée de son infusion. " Je présume que votre présence parmi nous est un bel exercice de tempérance, Générale ? " La silhouette était toujours là, il n'avait pas besoin de se tourner pour le vérifier, il le sentait. Sek'nos n'avait pas encore eu l'occasion de se présenter à la jeune femme, il faisait là une entrée en matière somme toute un peu trop chevalière mais l'idée qu'une bataille de chiffonnier se déclare sous son nez ne l'avait pas véritablement emballé. Néanmoins, l'affaire étant close, son sourire se teinta de ce léger amusement qui habillait souvent ses traits.

La tension semblait à son comble dans la salle alors que les deux partis se faisaient face, chacun prêt à défendre sa position et sa pensée la plus profonde. Kei se sentait blessée mais elle comprenait la rancœur de tous ces gens qu’elle rencontrait. Elle était la quintessence de l’instrument de bien des souffrances de ce peuple, rien ne pourrait jamais pardonner certains de ses actes. Elle ne pouvait qu’apprendre à faire amende honorable. Malgré tout, cela devenait difficile à vivre au quotidien. Bien sûr la jeune femme était habituée au climat hostile de l’empire, où chaque faux pas peut vous mener à la tombe, à la moindre de votre faiblesse qu’un ennemi ambitieux aurait perçu. Mais elle avait le pouvoir et la connaissance, elle maîtrisait l’art de la négociation et l’évitement constant de se retrouver dans pareilles situations. ici, plus rien ne la protège de la colère. Seulement ses mots et parfois ses poings. Kote, son frère, serait si déçu de son attitude mais l’ancienne générale avait besoin de se montrer forte, comme une tour imprenable, pour réussir à survivre dans cette guerre. Il était important de pouvoir compter sur ses alliés et de ne pas craindre un coup de couteau dans le dos. Alors elle relevait la tête, faisant face à tous ces détracteurs. Ouvrant la bouche pour répondre, elle fut interrompue par un homme, un commandant qu’elle avait vaguement croisé mais avec lequel aucune interaction n’avait perturbé son quotidien.

- Commandant, bien que je dois vous remercier pour cette intervention, une personne ne sera pas toujours dans les environs pour apprendre à ses hommes à se comporter. Je dois avouer que je me sens légèrement désappointée que vous m’ayez jugé inapte à répondre à ses rebelles si peu civilisés. N’ont-ils pas appris les bonnes manières ?

Kei s’avança légèrement, faisant désormais face au commandant inconnu qu’elle avait sûrement vaguement croisé sur la base, sans faire plus attention. Cassiopéa était semblable à une fourmilière, une fourmilière particulièrement chaotique s’il voulait son avis. Parfois elle ne pouvait s’empêcher de penser comment une hiérarchie pouvait prétendre à s’imposer par ici. Rebelles certes mais surtout rebelles dans le cœur et dans toutes les actions qui se présentaient à eux. Ce n'est malheureusement pas ainsi que se gagne une guerre. La guerre demande de la détermination et une discipline à toute épreuve, une volonté de fer pour ne pas flancher à la moindre perte difficile, un grand courage quand une poignée doit faire face à une véritable armée. Kei l’avait choisie, peut-être par dépit mais elle ne serait pas dans le camp des perdants. La galaxie méritait une paix durable après toutes les horreurs ignobles qu’elle avait eu à affronter ces dernières années.

- Pardonnez ma vive réaction Commandant . Je ne suis plus générale, il ne sait à rien d’user d’un titre obsolète, vous pouvez m’appeler Keireann. Je tiens également à excuser les propos vulgaires que vous avez pu entendre il y a peu. La tension qui règne ici est parfois difficile à supporter mais je tiens tout de même à vous préciser que je ne cherche pas à servir de distraction. Mon rôle et mon devoir je l’ai choisi, celui d’aider pour une galaxie meilleure, cela demande des sacrifices. Cependant, je peux comprendre leur rancœur Commandant. La guerre cause mort, douleur, perte.

L’ancienne générale passa devant l’homme tout en continuant son discours, se servant un autre verre de thé chaud. La saveur était insipide mais cela était tout de même réconfortant de se tenir à quelque chose quand vous avez une conversation qui vous met mal à l’aise. Interagir avec de nouvelles personnes est pourtant une de ses compétences clés mais ici, sans aucune maîtrise des situations, cela devient à chaque fois une prouesse complexe.

- Je vous en prie, asseyez-vous. Kei prit place sur l’un des nombreux bancs de la salle. Veuillez pardonnez mon indiscrétion Commandant, mais sous quel nom dois-je vous appeler ? Nous nous sommes peu croisées, est-ce une nouvelle affectation ?

Les horizons étaient larges autour d'eux, l'élargissement des profils avaient explosé ces dernières années et apprenait à tous la cohabitation. C'était d'ailleurs peut-être là une répétition avant la grande générale de la galaxie, alors autant que chacun puisse y mettre du sien. Néanmoins, dans cette fourmilière chamarrée il demeurait bel et bien une structure qui veillait notamment à la bonne tenue de la construction. Dû à son propre historique, Sek'nos était le mieux placé pour rappeler ce fondement à la gente des oiseaux de l'espace chez lesquels il avait une réputation sans faille. Alors il s'était manifesté, rappelant à l'individu qu'il n'était pas dans la cantina d'une planète exilée.

▬ " Commandant, bien que je dois vous remercier pour cette intervention [...] N’ont-ils pas appris les bonnes manières ? " La rhétorique attisa un peu plus l'amusement des traits de l'interpellé qui releva le nez de sa tasse pour observer cette fière demoiselle empressée de revendiquer son être.

▬ " Je suis certain que vous êtes bien des choses, mais pas inaptes à vous défendre contre des mots. " Surenchérir sur les manières du précédent intervenant n'avait guère d'intérêt, il ne connaissait pas assez l'énergumène pour émettre un avis ou une boutade alors que ce dernier n'était même plus là pour se défendre. Non à la place Sek'nos préféra rassurer la demoiselle sur son estime, laissant peut-être percevoir que son intervention avait été sans doute plus égoïste qu'elle ne semblait le penser.

▬ "Pardonnez ma vive réaction Commandant . Je ne suis plus générale, il ne sait à rien d’user d’un titre obsolète, vous pouvez m’appeler Keireann. [...] Veuillez pardonnez mon indiscrétion Commandant, mais sous quel nom dois-je vous appeler ? Nous nous sommes peu croisées, est-ce une nouvelle affectation ? " Le regard clair, dissimulé derrière ses lunettes, suivi un peu les tribulations de son interlocutrice. Rencontrant pour la première fois la jeune femme qui se dissimulait derrière les lignes de quelques rapports, son attention était relativement fixe même si ses yeux finirent par redescendre vers sa tasse avant qu'il ne boive une nouvelle gorgée. Les commissures de ses lèvres se crispèrent légèrement sous le goût amer de la décoction avant qu'il ne s'intéresse à son interlocutrice qui s'était installée non loin.

▬ " C'est que les archives ont tendance à venir à moi plutôt que l'inverse. " Le soupçon d'amusement revint brièvement sur ses traits l'espace d'un instant. " Vous pouvez m’appeler Filtayn, le "commandant" n'est plus qu'une tradition qui semble vouloir perdurer dans la Flotte. " Révéler son identité décédée aux yeux de l'Empire n'était pas la chose la plus futée à faire bien évidemment. Cela relevait d'un grain de folie ou d'une dose de confiance mais cela la jeune femme ne pouvait guère le détecter si elle n'avait pas ces informations spécifiques qui commençaient à dater aujourd'hui. Et puis il avait été décidé de lui faire confiance n'est-ce pas... " Votre mission vous convient-elle ? " Le grand écart entre son ancienne vie et celle qu'elle semblait vouloir dessiner à présent devait être déroutant. Tant d'années à grimper dans les échelons pour subir une réalité et redescendre dans une nouvelle société, la fracture était perturbante pour tous. Néanmoins, les attributions accordées à la nouvelle venue formaient un pari osé, accordé grâce à la ferveur de ses soutiens car la placer dans un lieu où s'accumulaient les informations n'était pas une position banale.

Sa décoction bien entamée, Sek'nos se remit doucement sur ses pieds, saisissant sa tasse au passage avant de suggérer à son interlocutrice de faire quelques pas de deux pour s'extraire de la cuisine et rejoindre le blanc immaculé des couloirs. " Avez-vous des suggestions sur le rôle que vous pourriez tenir pour aider la construction de cette "meilleure galaxie" ? " Notre homme témoignait là d'une simple curiosité, accumulant comme à son habitude les informations pour mieux les décanter par la suite. À croire qu'il était né ainsi alors qu'il n'était que le fruit d'une longue construction.