pecs et pecs sur un vaisseau (noorus#1)

Nocte est introuvable depuis leur dispute. Arcturus a cherché, puis il a jeté l'éponge. Non pas parce qu'il n'a pas envie de le revoir, mais parce qu'il réalise que ce n'est pas comme ça qu'il va pouvoir le récupérer. Pas avec son mode opératoire habituel. Certainement pas en restant à ne rien faire, en espérant qu'il suffira de ses jeter à ses genoux et lui demander pardon pour qu'il soit accordé. Il va devoir faire des efforts, sérieux, et changer sa façon de voir les choses si il veut voir un résultat concret. Ce sont des belles promesses qu'il balance depuis des années, l'espoir qu'il finira par se réveiller et voir la réalité en face. Il continue de vivre dans son monde de paillettes et d'or où les problèmes des autres ne peuvent jamais l'atteindre comme ils ne devraient. Qu'en sait-il de perdre son peuple, sa famille ? Il a le privilège d'avoir refermé cette plaie depuis longtemps, elle n'a jamais été franchement douloureusement. Sa famille, il 'la trouvée chez d'autres, dans les yeux d'amis qui sont encore là aujourd'hui. Nocte vient de découvrir la vérité, il a tout perdu. C'est de sa faute si il n'a pas pu être là à temps. C'est faux. Il a bien fait, si il avait été là, l'Empire l'aurait tué en premier. Il ne veut même pas imaginer un monde où Nocte n'est pas là. Arcturus a fait son choix, égoïste, celui de le garder auprès de lui quitte à le perdre pour tout.

Il ne sait pas vers qui se tourner pour trouver ses réponses, si seulement il y avait une question concrète. En venant chercher Noon, ses attentes sont faibles. Il est surtout curieux de rencontrer l'androïde dont on lui a si souvent parlé. Ses préjugés sur les androïdes encore profondément ancrés, mais puisque celui qu'il a trop longtemps appelé son frère y tient, c'est qu'il a su y voir quelque chose que son regard doit apprendre à percevoir. Il voudrait pouvoir voir le monde à travers les yeux de l'Atlan, et toutes les merveilleuses qui semblent se dégager du commun. Le pilote n'a qu'une vague idée de ce à quoi il ressemble. Il cherche des muscles, c'est sa seule indication. Il cherche et trouve. Aux dernières nouvelles, il est toujours avec l'équipage d'un vaisseau, des chasseurs de primes. La malaise est moins grand à l'idée de traiter avec quelqu'un de la ruche, de près ou de loin. Arcturus a grandit dans la pègre. Il a été adopté par un monde voyous et des personnalités acérées.  « Noon ? » Il demande, immobile devant la cale ouverture du vaisseau où un androïde travaille. La code barre à l'arrière de sa nuque en témoigne. Les mains dans les poches de son manteau onéreux, Arcturus tremble contre le froid et l'appréhension. Maintenant qu'il est là, il ne peut plus se défiler. Il trouvera ce qu'il venu chercher. Son interlocuteur est légèrement plus grand que lui et ne lui inspire pas spécialement la sympathie. Il a l'air plus fermé qu'avenant. Le pilot reste confiance, c'est un ami de Nocte. Nocte ne choisit pas les gens au hasard, il espère. « Est qu'on peut parler  ? » Il lui demande, mais le fait quand même, grimpant dans le vaisseau.  

Enième jour cloué au sol. J’commence à trouver le temps long, à tourner en rond entre l’absence de Vee, les membres d’équipage qui se blessent pas assez souvent pour m’occuper et Nocte qui déprime dans le lit de Vee. Quand il est là, du moins. Ça lui prend de disparaître, à l’occasion, et il manque d’un tracker dans sa jambe pour le retrouver, honnêtement. Mais bon, j’ai beau ruminer jusqu’à ce qu’il revienne, ça change rien. Faut s’faire une raison. J’sais pas quoi faire de ça. J’sais pas quoi faire de lui. J’suis pas bien placé pour l’aider à aller mieux, si j’étais psy ou que j’avais un minimum de tact, ça se saurait. Ça n’a jamais le cas. Même avant mon caractère de merde, j’avais aucun tact, et j’captais rien aux humains. C’est impossible à comprendre, leur sentiment d’appartenance, leur notion de famille, pour des androïdes qu’on a programmés pour s’attacher à un seul maître, comme une fidèle bestiole. Je peux pas comprendre ce qu’il a perdu. Ça me rend malade, mais j’peux pas. Alors j’me tais. J’lui dis pas d’arrêter de pleurer quand je l’entends sangloter en pleine nuit, j’lui dis pas qu’il ferait mieux de s’trouver un job et d’faire plus attention à sa santé. C’est le temps, qui soigne ces blessures-là, pour les humains. Ils oublient un peu, les angles s’arrondissent, et puis ça va un peu mieux chaque jour. J’suppose. Y’a qu’à attendre. Même si j’supporte pas d’attendre sans rien foutre.
Peut-être pour ça que j’trouve n’importe quoi comme prétexte pour m’occuper l’esprit. Aujourd’hui j’nettoie et j’huile les portes qui ont pas reçu d’entretien depuis des lunes, à en juger par leur état. C’est une bonne chose. Ça va me prendre une bonne heure au moins de les remettre en état. J’suis à peu près à la moitié de la tâche quand une voix étrangère lance mon prénom depuis l’extérieur. Je me redresse, me retourne vers lui, les sourcils froncés. Aucune idée de qui est c’type. J’l’ai jamais vu. Une moustache débile comme ça, ça s’oublie pas, croyez-moi. Je plisse les yeux, méfiant, c’est encore le bordel entre les androïdes et l’Empire, et j’ai pas trop envie d’me faire prendre parce que j’aurais été trop sympa avec un espion. J’ai ma puce de la Ruche, certes, mais si l’enfoiré connaît mon nom, il a déjà trop d’informations. Faut croire que j’ai pas l’air si méchant parce qu’il se permet d’entrer dans le vaisseau. Je bouge pas, le dévisage un moment. Le gars est bien habillé, s’il est de l’Empire, il doit être haut placé. Les soldats peuvent pas se payer des manteaux qui donnent autant l’air con. T’es pas sur le bon vaisseau, y’a pas d’concours de Mister Moustache dans l’coin. J’le bouscule pour passer de l’autre côté avec ma burette à huile, sans aucune délicatesse. Il me fait déjà chier à empiéter sur mon espace, peu importe qui il est. Si tu veux pas salir ton beau manteau, tu ferais mieux d’te barrer direct.

Il ne s'attendait pas non plus à ce qu'on lui déroule le tapis rouge. A quoi il s'attendait ? Il y a un tas de choses qu'il lister, comme ça, qui lui viennent instinctivement à l'esprit, tout et rien. Nocte lui a décrit l'androïde surtout en parlant de ses pectoraux et le reste, ce n'est qu'une image un peu brouillon qu'il a dessiné dans sa tête à l'image de ce qu'il aurait été aimé voir. Quelqu'un de sexy, vraiment bien gaulé et avec le minois charmant et le verbe qui suit. Il ne voyait pas l'Atlan aussi proche d'une brute de décoffrage, mais ça ne l'étonne pas. Ni de la boite de conserve, ni de l'autre, parce que de toute façon Nocte à ce talent de voir chez les autres ce que les autres ont l'air de manquer dans leur miroir. Il ne sait pas quel opinion Noon à de lui, ce qu'il a raconté, si l'androïde a déjà eu un peu vent des célébrités ici ou si sa vie se résume aux tâches auxquelles il est employé. Ca ne sonne pas Atlan sur sa langue Noon, ça n'a pas l'air d'un un surnom, une invention, il connait assez de mots pour le déduire. Arcturus soupire et hausse les épaules. Il s'en fiche de son manteau maintenant, des apparences. Il veut le retrouver.

Avant peut-être il aurait pesté, grimacé, exprimé son désaccord à l'idée de s'approcher d'une matière qui ne lui dit rien qui vaille. A vrai dire le seul usage qu'il a d'un lubrifiant c'est quand il est dans sa chambre avec de la bonne compagnie ou qu'il s'occupe de son vaisseau. Et encore il paye des gens pour ça. Quand on a beaucoup d'argent et qu'on le dépense, on paye pour tout. Dans son cas il a payé pour qu'on lui fasse à manger, qu'on lui nettoie sa maison, quand l'entretienne, qu'on le flatte et qu'on le malmène un peu, quand même, parce que ça fait du bien de temps en temps de se prendre une gifle. Sauf que Arcturus n'a jamais prit de gifle, pas jusqu'au jour où Nocte lui a fait comprendre quelque chose s'était brisé et que c'était de sa faute. Il vient faire amende honorable. « ...Ok. Il m'a dit que tu étais sexy mais il aurait aussi pu me dire que tu avais le caractère d'un Nexu affamé. » Il balance comme une pique amicale qui n'est pas vraiment consensuelle à partir du monde où ami, ils ne le sont pas. « Bon écoute moi c'est Arcturus, je suis un ami de Nocte. Toi aussi t'es un ami de Nocte on est d'accord ? Celui avec les muscles ? » Il le désigne du bout du doigt. « Tu le connais. J'ai besoin de ton aide. »

Un autre truc que j’comprends pas chez les humains : leur obstination. On a beau leur dire qu’ils sont pas les bienvenus – franchement, j’pense pas y être allé par quatre chemins, sur ce coup-là –, faut toujours qu’ils restent là, les bras ballants, l’air con, à insister. A croire qu’ils aiment se faire malmener. J’devrais peut-être rajouter plus d’insultes, dans mes prochaines paroles ? Ou si j’lui verse l’huile sur la gueule, peut-être qu’il va décamper ? C’est plutôt tentant d’essayer. Non mais, parfois j’me demande si j’ai l’air sympa sans le savoir. Faudrait que j’pose la question à Vee, quand cet abruti s’décidera à rentrer de son rêve fermier. Le type s’autorise à soupirer et à hausser les épaules comme si c’était moi qu’étais venu l’emmerder, en plus. Sont toujours bons pour se poser en victimes, les humains. Les pauvres, on les écoute pas, on s’occupe pas assez d’eux. Ils se sont créés des machines pour ramasser toutes leurs merdes derrière eux et c’est toujours pas assez. ...Ok. Il m'a dit que tu étais sexy mais il aurait aussi pu me dire que tu avais le caractère d'un Nexu affamé. Mes sourcils se froncent un instant et je lui jette un nouveau regard, encore plus blasé que les précédents.
Il me faut pas longtemps pour capter qui est il. Y’a pas des masses de crétins pour insister lourdement sur la soi-disant beauté de mes abdos. On va rajouter ça à la liste des choses incompréhensibles chez les humains. Autant le fait qu’on m’ait filé ces faux muscles qui font baver Nocte, que le fait qu’ça fasse baver Nocte. Sérieusement, le commentaire sur mon caractère est plus approprié. Bon écoute moi c'est Arcturus, je suis un ami de Nocte. Toi aussi t'es un ami de Nocte on est d'accord ? Celui avec les muscles ? Y’a un soupir très prononcé qui m’échappe, en entendant son nom. J’sais pas pourquoi j’ai pas fait le rapprochement plutôt, Nocte m’a tellement souvent décrit cette moustache en long et en large. Apparemment, il a fait la même avec mes muscles pour le fameux yawntutsyìp. Il me fatigue. Il est même pas là, et il me fatigue. Et l’Arcturus, là, c’était chez lui que Nocte créchait, avant de s’pointer sur le Bumblebee. J’ai pas demandé, mais j’suis sûr que y’avait une raison pour laquelle il y est pas retourné et qu’il a plus mentionné l’autre par son surnom débile. Tu le connais. J'ai besoin de ton aide. J’me retourne vers lui, abandonnant ma porte, les mâchoires serrées pour paraître le moins avenant possible. Ah ouais ? Bah moi j’ai pas besoin de t’aider. Tant qu’il est pas en danger, j’peux lui dire non facilement. Ça fait du bien. J’sais pas ce qu’il t’a raconté comme conneries sur moi, mais j’suis pas son ami, ni un appareil de géolocalisation. Juste un androïde plein de bugs, c’est suffisant. Si t’es son pote, tu dois savoir que c’est son truc de disparaître. Et tu d’vrais faire pareil. Les bras croisés, je le toise sans gêne, espérant qu’ça le pousse à se barrer vite fait.

Arcturus n'avait pas de plan précis en venant voir Noon, et les choses ne sont pas plus claires maintenant qu'il a l'androïde en face de lui. Il a suivi son impulsion, en se disant que si il rencontrait quelqu'un de proche de Nocte, il pourrait mieux comprendre son choix et l'accepter. Qu'il serait plus à même de trouver quoi dire si Nocte refaisait surface. Et tout cela reposait sur l'hypothèse où son ami daignerait lui adresser la parole un jour. Ils ne se sont pas quitté sur des cris, il n'y a avait presque aucune colère. Juste un glaçant au revoir capable de lui faire revivre la panique du départ de Kael. Il pourrait tout aussi bien le remercier. Pour la première fois, le schéma lui apparait évident et il a l'impression d'avoir la clé qui lui permettra de ce sortir de cette boucle où il finit toujours pas décevoir ceux qu'ils aiment. En commençant par se décevoir lui même. C'est tellement évident qu'il se demande comment toutes ses années il n'a pas été capable de comprendre que ça va au delà du fait qu'il est le problème.
Il ne veut pas regretter, se dire qu'il aurait pu tendre la main au lieu de s'enfermer dans son coin et prier qu'il revienne comme une fleur, ou se résigner et mettre fin à son amitié par lâcheté.
Les mots de l'androïde ne sont pas agréables, ils sont nécessaire, c'est toute la nuance. « Et si t'avais besoin de quelqu'un chose ? Comme ça on voit prend ça pour un échange de service. » Il tente de marchander, n'ayant aucune idée de la manière dont il va pouvoir obtenir ce qu'il cherche et il se dit que si il amène la chose comme un service rendu il pourrait cheat son système. Au fur et à mesure que les minutes passent, c'est comme si il ne savait déjà plus ce qu'il était venu faire ici, comme si ça n'avait pas d'importance car ce n'est pas en demandant à son ami robot qu'il va vraiment faire avancer les choses. Peut-être qu'effectivement il devait partir en courant, la queue entre les jambes et prier les étoiles. Il doit faire un travail sur lui même avant toute chose. Oui mais, peut-être que Noon est déjà passé par là. Peut-être qu'il peut éviter de blesser encore plus son ami. Il doit essayer, pour toutes les fois où il est resté les bras ballants à se morfondre, refusant d'accepter sa responsabilité sauf pour se victimiser. « C'est différent cette fois. » Il fait un pas en arrière tout de même Je veux juste le comprendre un peu mieux. Je ne te demande pas de me le trouver. » Il ne relève même pas le moment où l'autre prétend qu'ils ne sont pas amis. Après tout ce n'est qu'un androïde il ne doit pas tout comprendre de l'amitié.