Time for truth [Uriel]

Son Maître n’avait pas cessé de lui tendre des pièges depuis le début de leur entrainement. Il faut dire que ça lui plaisait plutôt bien à Aayla, ravie de relever ces défis à la hauteur de son talent. De toutes ces heures d’entrainements, la blonde n’avait récolté que quelques égratignures. Certes, celle-ci s’étaient mises à saigner mais elle s’en fichait. Enchantée par ses progrès, elle mit fin à l’entrainement en coinçant son maître. Elle apprenait vite, Aayla, quand elle n’était pas déconcentrée par un de ces objectifs principaux. Il suffisait que son père passe non loin d’elle pour qu’elle soit distraite, ce qui n’était pas très apprécié.

Libérée un peu plus tôt, la jeune femme mis à profit ces heures pour s’entrainer dans son coin. Sabre à double lame, elle répéta les enchainements sans relâche, jusqu’à ce que ce soit parfait. Jusqu’à ce qu’elle finisse par se couper une nouvelle fois car ses pensées n’étaient plus à l’entrainement. Rengainant l’arme, Aayla décida qu’elle en avait assez d’attendre. Quatre années à faire du mieux qu’elle pouvait pour qu’il la remarque, quatre années à s’entrainer sans relâche pour pas grand-chose. Pas même un regard. L’apprentie décida qu’elle avait été suffisamment patiente : il était temps de passer à l’action.

Débarbouillée, vêtue de noir et quelques touches de rouge foncé, la Sith se dirige d’un pas vif vers le bureau du Seigneur. Elle suppose qu’il se trouve là, elle l’espère même. Elle est prête à tout lui avouer, blindant tout de même son cœur car elle était à peu près certaine qu’il ne la croirait pas. Elle avait pourtant besoin de se sentir reconnue, qu’importe les conséquences. Aayla ne comprend pas comment il n’avait pas pu sentir ce lien qui les unissait. Il y avait quelque chose, non ? Ou alors elle se l’était imaginé.

Finalement, au détour d’un couloir, la porte tant attendue. Gardée par deux hommes qui ne veulent pas la laisser rentrer. Et pour cause, Aayla se pointe sans prévenir, étrangère à ce Sith. Agacée, la jeune femme ne se laisse pourtant pas démonter. Relevant le visage, le regard mécontent, elle s’adresse à l’un d’eux.

« J’ai rendez-vous avec le Seigneur Quilter. » Ils hésitent les idiots. « Il n’aime pas qu’on le fasse attendre. »

Elle insiste, sûre d’elle. Victoire. Aayla ne sait pas dans quoi elle s’engouffre mais elle ne peut plus reculer. Ni une ni deux, gardant cette apparente décontraction, l’apprentie s’engouffre dans le bureau du Seigneur Sith. Les portes se referment derrière elle sans qu’elle n’y prête attention. C’est à peine si elle jette un œil au décors plutôt sobre. Toute son attention est portée vers l’homme qui se trouve en face d’elle. Plantant ses prunelles bleues dans celles de son père, Aayla ne peut s’empêcher.

« Vos gardes ne sont pas très doués. »

Léger sourire amusé, la jeune femme se reprend rapidement, baissant sa capuche laissant apparaître sa longue chevelure blonde. Si on la regarde bien, il y a quelques reflets blancs. L’apprentie se fait happer par la sensation d’avoir enfin trouvé une part d’elle-même.

« Je me nomme Aayla Ivor et je suis votre fille. »

La blonde ne veut plus perdre de temps et elle n’est pas là pour tourner autour du pot. Il est temps de se dévoiler. Temps qu’il prenne ses responsabilités. Elle se doute qu’il ne va pas la croire sur parole mais Aayla est déterminée, elle est prête à passer tous les tests qu’il voudra.

Ses opales puissantes fixent une dernière fois sa victime. Les suppliques qui résonnent encore dans ses oreilles alors que le corps allongé sur le sol, sans vie, se déverse de ce qu'il reste de son sang. Uriel ne fait pas dans la dentelle, c'est connu. Se mettre à dos le seigneur noir résulte d'une mise à mort imminente. Uriel ne se déplace pas énormément, pas souvent. Seulement pour les cas les plus grave, ceux qui ont besoin de voir la mort en face. De comprendre qu'il n'y aura pas de retour arrière. Il détermine constamment le droit de vie ou de mort sur la population, use de sa force, abuse de son pouvoir. Peut être que ça finira par le perdre, lui le prince, le roi du côté obscur. Un cœur noirci par la haine et la colère, par l'envie de se faire plus qu'une simple place dans ce monde écaillé par la division. L'homme qui range son sabre laser, la détermination à dominer le monde quelque soit les moyens pour y arriver. Il fait marche arrière, retourne sur ses pas en laissant la chose sur le sol sans se préoccuper des conséquences à venir. Il sait que personne ne l'observe pour le moment, ses sentinelles postées partout qui ne peuvent que l'avertir du danger. Un homme qui sait s'entourer, qui sait comment gérer les choses. La manipulation au cœur de son existence toute entière. Siège au sein de deux conseils, toujours plus proche de son but qu'il y a cinq ans. Il a fini par se faire une place dans ce monde qui se contentait de lui cracher au visage. Aujourd'hui, l'envie cruelle de ne plus régresser.

Il regagne son bureau, ses appartements. Arpente le palais de son pas lourd, la botte qui racle le sol. On le salue, il répond à peine. L'homme qu se contente de retourner à son bureau, s'y installe et reprend ses activités. Ce n'est que quelques minutes plus tard qu'une jeune apprentie fait irruption dans le bureau d'un Uriel en pleine conférence. Il l'observe, la dévisage, coupe l'appel de l'holocom. Comment une apprentie comme elle a pu passer les gardes aussi facilement. Uriel va devoir leur remonter les bretelles. Il observe la jeune fille, chevelure blonde scintillante, ressemblant à une parure dorée, légèrement blanche. Il détermine sa force, observe son visage poupon et pourtant empreint d'une certaine ferveur. Puis, elle lâche un bombe qui fait hausser les sourcils du sith. On ne lui avait encore jamais fait ce genre de blague. Il ne bouge pas, l'observe simplement sans se soucier de ses propos. Ment-elle ? Il n'en sait rien. Uriel n'a eu aucune attache auprès d'une femme, se contentant la plupart du temps de voler ici et là et de profiter. Il n'a jamais imaginé qu'un enfant puisse franchir les portes de sa vie et se déclare comme tel. Il fait une moue songeuse, baisse les yeux avant de se lever. « Bien essayé... Ce serait tellement gratifiant pour une apprentie de ton genre de te prétendre liée à moi par le sang. » Il n'y croit pas. Œillères qui couvrent sa vision des choses quand, physiquement elle peut lui ressembler. Mais il n'y croit pas. La fibre paternelle absente de ses gênes.

Doucement, le sith avance vers la jeune femme et se glisse dans son dos. Il l'observe avec attention, de haut en bas. Il la connaît, l'a déjà vu au sein de l'académie, parmi d'autres élèves. Il sait qu'elle est douée, l'a déjà observé au combat. L'homme est posté dans son dos, glisse sa main sur la nuque de la demoiselle, la pressant doucement entre les doigts de sa main. Il ne cherche pas à lui faire mal. « À qui as-tu raconter cette histoire... ? » Il doute tellement de la véracité de ses propos, convaincu qu'elle ne vient chercher que de quoi dorer son rang de petite apprentie. « J'ai déjà un apprenti. » Bien qu'il le troquerait volontiers contre quelqu'un d'autre de plus utile et plus doué.

Aayla joue sa  vie dans ce bureau. Sa vie et son avenir. Mais elle s’en fiche car elle ne désire qu’une seule chose : avoir un père. Elle ressent ce lien qui fait battre si fort son cœur, cette impression d’avoir trouvé une part d’elle-même. Elle ne ressent plus que ça et doit se concentrer pour faire attention au seigneur sith. Il est évident qu’il ne la croit pas, ça aurait été trop facile. Et puis, pourquoi la croirait-il ? Aayla attend, les prunelles figées dans celles de son père. Ne ressent-il pas ce qu’elle ressent ? Il parle mais il ne la croit pas. La blonde ne se démonte pas, ne bougeant pas d’un pouce. Elle ne peut néanmoins s’empêcher de lui répondre du tac au tac, les sourcils légèrement froncés.

« Prétendre être la fille de mon Maître aurait été plus gratifiant. »

Certes, il était le bras droit de l’empereur. Mais être la fille de Dark Quilter la rendait plus fière encore. Piquée au vif, Aayla se redresse et observe l’homme se déplacer jusqu’à elle. Elle le voit la jauger, lui tourner autour. Il s’arrête derrière elle et Aayla ne peut s’empêcher d’être à l’affut. C’est un Seigneur Sith tout de même. Elle se concentre et le perçoit aussi distinctement que s’il était devant elle. La jeune femme sent la main de son père dans son dos puis sur sa nuque. Ce n’était sans doute pas un bon présage. Pourtant, le contact la réchauffe, la soulage. Elle s’en veut de ressentir ses émotions. Ses épaules se relâchent légèrement. Elle entend la question Aayla, mais elle la trouve stupide.

« A personne. »

Pas même à son Maitre. Elle est sûre d’elle, sa voix claque, vexée par ce manque de confiance. Mais après tout, il ne la connait pas. Peut-être qu’Aayla espérait des retrouvailles plus faciles. Mais pas plus intense. Ce lien qu’elle avait cherché depuis toujours semblait embaumer la pièce. Il n’y avait sans doute qu’elle qui le ressentait. Il parle d’un apprenti et si l’envie de serrer les dents la prend, elle finit néanmoins par lâcher un petit rire.

« J’ai déjà un excellent Maitre. »

Finalement, elle ne tient plus et se retourne telle une anguille. Il est si proche d’elle, et elle est si proche de son but. Pourtant, les prunelles du Sith ne sont que doute et incompréhension.

« Vous ne ressentez donc pas ce… lien qui nous unit ? »

Par respect, néanmoins, elle se recule d’un pas. Ses yeux sondent les siens dans l’espoir d’y déceler quelque chose. Pour une fois, ce n’était pas l’ambition qui l’avait amenée jusqu’ici. Juste la vérité et l’espoir, peut-être, d’avoir un père.

« Lisez là-dedans, » dit-elle en touchant son crâne. « faites-moi passer tous les tests que vous voudrez. Je suis votre fille. » Il allait bien devoir l’accepter un jour ou l’autre. « Il y a tout de même un air de ressemblance. »

Ce n’est pas une question mais plutôt une affirmation dans l’espoir que cela lui ouvre les yeux. Elle lui ouvre également son esprit, ses pensées et ses souvenirs. Le jour où elle a été enlevée à sa mère, ce nom qui sort de la bouche de sa génitrice. Elle ne pouvait pas lui avoir menti, à quoi bon alors que la mère ne reverrait jamais sa fille. La blonde est têtue, elle ne se démonte pas face à ce commencement difficile et elle est bien décidée à prouver au Seigneur Quilter qu’il est désormais -l’heureux- père d’une fille de dix-neuf ans.