Un visiteur, venu d'ailleurs - Jiirso

La nuit tombée lentement sur la ville de Theed, Dom pouvait observer le soleil se coucher de la fenêtre de sa vitrine. Il était temps de fermer, de toute façon, les clients ne venaient plus vraiment après 18h, le quartier était bien trop dangereux. Peut-être qu’il aurait dû s'installer dans un endroit plus chic, mais cela avait forcément un loyer élevé, pas ce qu’il pouvait se permettre quand il avait ouvert la brocantina. Puis il aimait cet endroit maintenant, rien de mieux pour faire des affaires privées quand on ne voulait pas que certains viennent fourrer leurs nez dans ses cachoteries. La plupart des marchandises qu’ils vendaient étaient des biens volés, parfois empruntés dirait-il, parfois trouvés ou enfin piller était le mot exact. Mais bon les vieilles ruines n’étaient plus à personne non ? Et si les gens n’avaient pas récupéré leurs biens, ce n’était pas sa faute. Il s’était juste servi avant les autres. Il avait appris à la dure que la vie c’était cela de toute façon, prendre ou être ruiné. Ainsi va le commerce de nos jours. C’est bien loin de son temps chez les Jedi.

Dom repense parfois à cette période avec une certaine mélancolie joyeuse, cela lui semblait s’être passé il y a plus d’une vie. Il avait tellement vu de choses depuis que c'était presque comme si cela n’avait pas existé. La vie au Temple avait été une bénédiction. Ses amis et son maître lui avaient manqué parfois, il se rappelle d’eux avec tendresse, se demande ce qu’ils sont devenus avec l’avènement de l’empire, s’ils ont survécu, il l’espère de tout cœur. Dom aimerait beaucoup revoir Jiirso, il avait été presque comme un père pour lui, même si c’était un maître qui lui demandait beaucoup. Il ne pourra jamais lui remercier de lui avant tant donné et tant appris. Se rappeler du passé lui étreignait cependant le cœur, quand le souvenir de la douceur du visage de sa chère Alvene lui revient en mémoire. Non, cela par contre c’est une période que Dom préfèrerait oublier. Cela l’a mené sur des chemins qu’il n’aura jamais voulu emprunter, manquant de tomber dans les ténèbres les plus froides, car la perte était trop dure à surmonter. Il s’était demandé à plusieurs reprises si c’était ça la vie, de se voir arracher ce qu’on aime le plus fort. Son maître l’avait mis en garde mais il n’avait pas pu empêcher son cœur de l’aimer plus fort.

La menace de l’amour et de la chute était cependant toujours présente chez l’homme, chez l’ancien jedi. Alvene oublié dans un coin de son cœur, remplacée par la douce Mara, Jedi consulaire qu’il l’aidait parfois et qu’il admirait tant. Cependant, il n’oserait jamais aller plus loin. Le Jedi déchu avait appris à la dure que l’amour était synonyme de souffrance et qu’il n’y avait plus droit, pas aujourd’hui, jamais peut-être. Mais son cœur était tendre et cela ne l’avait pas empêcher de tomber pour la jeune femme.

Dom se déplaça pour fermer sa vitrine, la rue était calme, très peu de passants l'empruntent à cette heure ci, c’était agréable d’écouter le doux ronronnement des speeders au loin. Les cantinas devaient commencer à se remplir doucement, peut-être que ce soir il irait boire un verre aussi. Son refuge était vide depuis quelques jours, il n’avait plus de tâches particulières à s’occuper, la commande de fourniture pour l’alliance n’arrivait que dans deux jours. Autant en profiter pour passer du bon temps. Oui c’était un bon plan mais une sensation de la Force le retenait, lui demandait de rester encore un peu car un visiteur pourrait ne pas tarder à venir le rejoindre. C’était curieux, peut-être un homme qui avait désespérément besoin de quelque chose ? Dom s’en retourna vers sa cuisine, mettant l’eau à chauffer pour faire du bon thé tarine. Une fournée de cookies au lait de bantha était déposée sur son comptoir, qu’il avait cuisiné dans l’après-midi. Il déposa l’assiette pleine sur la table basse, déposant deux tasses l’une en face de l’autre. Il s'assoit dans son fauteuil favori, un holobook qu’il avait presque terminé dans une main. Le sifflement de la bouilloire lui signifie que l’eau était prête, il l’a fait venir à l’aide de la force. Une utilisation inappropriée lui murmurait son vieux maître, mais bien utile quand ses os commençaient à se faire vieux après de multiples aventures. Il était prêt, pour quoi, il ne le savait pas encore, mais d’après ce que lui disait la Force, se serait une soirée agréable de vieux souvenirs en perspective.

Alors qu’il se plongea un peu plus dans son roman, la porte s’ouvrit en grand, révélant une silhouette encapuchonnée, vêtue de robe jedi. Cela ressemblait fortement à un homme, un vieil homme d’après les pas lents et précautionneux du visiteur. Sa présence dans la Force semblait si connue. Non...cela ne pouvait pas être ?

- Bien le bonsoir maître, j’avoue que je ne m’attendais pas à une visite si tardive mais le thé est prêt, alors prenez place, je vous en prie.

Son vieux maître n’avait définitivement que peu changer. Les traces de la vieillesse se voyaient certainement, quelques rides de plus par ci, un peu de grisaille dans les cheveux par là, mais il était sans dire qu’il était toujours le même homme calme, posé et définitivement fier. Ce visage familier lui avait beaucoup manqué dans des périodes difficiles. Dom était plus qu’heureux de le retrouver enfin, ici, dans sa boutique, pour rattraper le bon vieux temps et déguster un thé, comme si les années n’avaient nullement passées.

- Et bien mon cher vieux maître, c’est vous qui m’avez appris à être toujours préparé en tout circonstance. Je vous en prie, prenez place avant que le thé ne refroidisse et soit beaucoup trop infusé pour votre goût, qui je l’espère, n’a pas changé.

L’homme semblait prendre son temps pour observer ici et là sa boutique et Dom ne put empêcher un léger pincement au cœur, attendant patiemment le jugement de son maître. Il était un homme d’une cinquantaine d'années mais Jiirso restera toujours une figure paternelle importante, qui l’avait recueilli quand il avait pensé voir ses rêves s’envoler et lui avait appris tout ce qu’il savait. Pourtant le Jedi ne s’était jamais soucié de ce que pouvaient réellement penser les étrangers mais Jiirso était sur un tout autre niveau de relation.

- Et bien, il faut apprendre à rebondir sur ses pattes, tel un lohcath et vous savez que j’ai toujours eu un petit faible pour toutes ses vieilleries. Il semble qu’il y a des choses qui restent immuables au temps.

La réplique de son vieux maître lui fit lâcher un petit rire heureux. C’est vrai, en repensant à ses nombreuses aventures, Dom avait certainement trouver la plupart de ses brics à brac lui-même. Parfois, en repensant au temps de l’aventure, l’adrénaline et la découverte lui manquait toujours un peu. Ne pas savoir ce qui serait fait demain, vivre au jour le jour mais sa vie par ici lui convenait finalement. Son refuge était surtout ce qui le gardait alerte. Bon nombre de personnes étaient perdues, pauvres, seules, attendant juste qu’une âme charitable leur tende la main et leur offre une seconde chance. Il n’était peut-être plus le Jedi d’autrefois mais il en garderait toujours la nature profonde, celle de l’amour désintéressé et de la bonté offerte, sans rien attendre en retour. Rien ne lui faisait plus plaisir que de suivre ses petits protégés de loin, dans leur nouvelles vies, en espérant que celle-ci ne serait pas à nouveau cruelle envers eux. Ils méritaient la paix, le calme et un peu de bonheur, surtout dans un air aussi sombre.

- Je vous avoue que je ne tiens plus le compte exact mais vous pouvez certainement penser que j’en ai trouvé moi-même une bonne partie. Des aventures, il y en a eu beaucoup au cours de ces vingt dernières années, bien que je me sois enfin posé, il va s’en dire. Cependant, je devrais peut-être penser à écrire le manuel du parfait pirate.  Cela aiderait mon compte en banque, certainement.

La gorgée de thé était la bienvenue pour préparer sa réponse. Il était bon, encore chaud, suffisamment infusé. Cela restait une boisson réconfortante, agréable, surtout quand elle est partagée avec votre presque père que vous n'avez pas vu depuis de très longues années. Le Jedi prit le temps de rassembler ses pensées.

- Est-il à votre goût ? Ou ai-je oublié de le sucrer davantage ? Domkod reste songeur quant aux questions posées par son maître. Il était évident qu’il était temps d’avoir enfin cette conversation, il lui devait bien cela après tout. Mais le souvenir douloureux de la chute de l’Ordre et de la perte de bon nombres de ses anciens amis étaient toujours tenaces et lui brûlaient toujours le cœur. Et bien, je suis encore là, tout comme vous, donc cela aurait pu être pire. Cependant, je crains que le temps ne soit pas si clément envers certains de nos amis. Je crains malheureusement d’avoir perdu beaucoup de monde, tout comme vous, je l’imagine. Mais que faire, à part lutter dans le plus grand secret ? Les gens n’ont certainement pas la puissance nécessaire pour s’imposer face à ce gouvernement destructeur. Mais la Force pleure, et le monde est devenu bien trop sombre mon vieil ami, qu’un jour je crains qu’il ne nous emporte tous si nous restons là à ne rien faire.