sarcophage (uriel)

"il y a quarante-deux milles techniciens à bord, commandant." les pas se réduisent. "je ne suis pas supposée répondre aux mêmes attentes." pour hadassah, c'est toujours le premier jour. ah c'est vous. oui c'est moi. son interlocuteur, en réajustant sa coiffe, pince ses lèvres. il fait beaucoup ça, se contrarier en la remarquant. elle le voit parce-que les détails de son visage se contractent en de petits nerfs. c'est remarquable, cette nonchalance, elle se dit. elle discerne qu'il est souvent compliqué de ne jamais la remettre en question. c'est moins parce-qu'elle est une femme que parce-qu'elle s'habille de cet air déconcerné. elle a une allure, pas de visage. un titre, pas de patronyme.
il y a quarante-deux milles techniciens à bord, commandant. a t'il seulement percuté ?
"les joints toriques ne sont plus un problème depuis des mois, je ne comprends pas ma présence ici." cet ersatz d'exoplanète est un petit chef d'œuvre, de la conception à la dernière plaque de quadanium. il est de ces exploits qu'elle retient. cette capitale spatiale qui se tapisse comme un ogre et fait désordre est un bel habit dans lequel se fondre, mais tout ce microcosme de la prévôté impériale n'a jamais beaucoup apprécié se laisser faire. elle ne rêve pas d'autres équateurs, d'autre vitres au travers desquelles regarder; pourquoi faire ? tous les espaces sont à porté d'œillades. les mécaniques les plus complexes s'érigent ici. il n'y a pas pareilles montagnes que les colonnes de la structure interne, d'autres océans qui se fracassent comme ce murmure qui ne s'éteint pas - celui des autres. de son statut elle ne s'est jamais réclamée, parce-qu'hadassah préfère observer. elle est méticuleuse dans la façon dont elle décortique, et puis il n'y a rien à ronger à sa propre surface. pas de grandeur, pas d'ambition, pas de dignité particulière. pas d'invective.

"meron, le disfonctionnement des joints est le deuxième cette année. vous êtes intelligente mais il ne s'agit pas simplement de ça." elle claque des dents. "au prochain incident, vous retournerez bricoler des membres à tous les estropiés d'hoth." se mord au sang. dans la poche de son blouson, les ongles percent la fine pellicule de sa paume, assez pour couper la circulation des vaisseaux aux épicentres des appuis. elle ne le regarde pas s'en aller. elle reste un peu hagarde, le temps que ne rampe l'information. seulement il n'y a rien à faire, elle reste sur le pas de ses tempes. que peut-elle de plus sinon faire ses quartiers ici. les particularités, à des milliers, des milliards, de kilomètres, lui son inconnues. les failles doivent toujours être rapportées, et jamais elle n'a semblé prendre de haut ses fonctions.

hadassah ne pleure pas. autour d'elle ils sont des milliers à porter le deuil depuis la guerre. elle n'est pas tragique, elle n'a rien à déplorer. d'extérieur il est déplorable qu'elle ne réagisse pas après s'être fait marcher sur la botte par un type au moins aussi vieux que la machine dont il est aux commandes mais l'intérieur se détache en de petits morceaux de peine. ses organes grondent mais elle s'y ferme et ne pleure toujours pas. bien sûr, à s'isoler du vacarme intime, elle ne sent pas que l'on vient de trouer sa tranquillité. alors en levant les yeux, sa surprise de tomber sur le visage altier du presque-seigneur des hôtes de ce vaisseau ne lui rend pas service honorable.

"merde."

L'étoile noire. S'il y a bien un endroit où il n'apprécie pas spécialement de mettre les pieds, c'est à cet endroit. Boite de métal reculé dans l'espace, loin de la terre ferme. Il observe la fourmilière active, les droides, les employés qui vont et viennent à ses côtés. Tous le salue avec respect quand lui les ignore complètement, les yeux rivés vers un objectif invisible. Les pas lourds du sith qui percute la coque de métal alors qu'il avance. Il se fiche de son entourage, déterminé à atteindre son objectif. Il entre dans la salle de contrôle, observe l'immensité de la galaxie qui s'étend devant lui, à travers la baie vitrée. Il se dit, parfois, qu'ils sont bien peu de choses. L'amiral qu'il avait besoin de voir s'approche de lui. La froideur du regard du sith se pose sur l'homme, le dévisageant. Un échange bref, cordial bien que remplit d'ordre de la part d'Uriel. L'homme qui ne s'étale pas en discourt inutile. Il soupire doucement, croise les bras dans son dos durant la conversation. Des ordres du chancelier, lui il s'en fiche pas mal. La conversation se termine, aussitôt il tourne le dos pour s'en aller. L'homme qui capte une conversation au détour d'un couloir. L'oreille intriguée qui se tend pour capter les brides d'une discussion entre un supérieur et une subordonnée. Il se fige, tend l'oreille. Les remontrances suivies d'une menace toute dictée par un chef qui ne supporte visiblement pas que les sous-payés soient plus intelligents que lui. Un fin sourire qui anime le visage du seigneur noir quand l'autre s'en va. Il observe la silhouette aux cheveux blonds qui semble affectée par ce qu'il vient de se passer. Lui s'en fiche, ça ne le touche pas. Cependant, il se demande si elle pourrait lui être utile après ce qu'il a entendu. Il s'approche d'elle, se cale dans son dos la toisant de toute sa hauteur. Il attend qu'elle repère sa présence. Ses opales qui se posent dans les siennes quand elle lève son visage vers lui. « J'ai besoin de quelqu'un pour mon vaisseau. » Qu'il souffle doucement. Ça ne sonne pas comme un demande mais comme un ordre plutôt. Elle. Il l'a choisi elle pour cette tâche. À elle de montrer qu'elle est capable d'avoir sa confiance.

L'espace change à deux. Hadassah a toujours senti ces particules de rien se perturber lorsque le silence n'est plus le même. Celui-là du reste, est inédit. Ce n'est pas quelque-chose qu'elle aime particulièrement, la lourdeur d'une telle présence. Sur hoth, il n'y avait jamais rien eu. La planète n'a pas d'autres humeurs que celles du ciel, et on est habitué à la véhémence de ses cycles. Lorsque l'on passe quinze ans dans une poubelle, le mieux pour ne pas devenir un déchet sera toujours de rêver mieux. Alors elle a imaginé les mondes, et ils les ont regardés, observés, spéculés. à deux. Elle a désiré la nature, les oiseaux, la caresse d'un rayon de soleil, les autres . Ces marées humaines, Hadassah les a fantasmées sans réaliser qu'elle ne serait jamais aussi seule qu'en cessant de les observer de loin. Il y en a bien un auquel elle s'est raccrochée comme à un fantôme sans jamais réussir à toucher du doigt plus que son souvenir. Il est là et elle le sait, et dans l'exacte et même démarche que des années plus tôt, elle se fait croire que c'est suffisant.

A quelques égards, il lui semble parfois devenir ainsi, une image derrière un écran ou un arrière-goût sous le palais. La menace susurrée quelques minutes auparavant lui a flanqué un coup en pleine nuque. Elle ne peut pas tout arrêter, pas maintenant. Pas comme ça. Le souffle s'est coupé contre le malaise et entre quelques organes s'est creusé le vertige. C'est en avalant ses soupirs, au moment précis où elle a le plus besoin de se terrer, que le silence change.

" Quoi ? " Elle claque. Ce n'est pas un petit chef qui surplombe son squelette. Celui-là est beaucoup plus corsé. Elle le sait, non pas aux traits taillés à la serpe de son visage ni au regard qui ne la convainque pas de sa douceur, mais parce-que lui, peut-être plus que n'importe quel autre Sith, traîne derrière son dos des murmures et des rumeurs de charognards. Ils se sont croisés, plusieurs fois. Si leurs regards se sont rencontrés, aucun de deux ne s'en souvient, pourtant. Il n'est pas le genre de personne autour duquel elle souhaite particulièrement partager un repas. Ses organes se sont bien serrés dans son ventre et le cœur vient de s’emballer.

" Je ne suis pas mécanicienne. " Elle ne siffle pas, mais le ton n’est pas donné à la jovialité. Son regard ne se dévisse pas de celui du seigneur noir. Ce n’est pas la fierté qui l’étreint, ni l’impunité ou l’insolence, mais une certaine élégance quant à son propre statut.

Les opales ténébreuses qui glissent sur le visage de la demoiselle. Fille qui le fixe avec une audace que certains n'osent pas, n'osent plus. Il aime ce genre de caractère. Pas trop entreprenant mais suffisant pour marcher sur les pieds du sith, asseoir une certaine autorité pour lui montrer qu'il n'est pas le roi de ce monde. Pas encore. Viking au sang noir, aux rumeurs placardés contre sa nuque. Il les connaît, il les entend et s'en délecte. Âme amusé d'entendre des ragots sur sa personne, faux ou vrais. Alimentant parfois la légende qui se dessine sur son passage. Certaines choses sont enjolivées d'autres non, certains y croient d'autres non. Il s'en fiche au final, quand il aura posé ses fesses sur le trône de ce monde galactique tous sauront de quoi il est réellement capable. L'envie de montrer au monde que les sith sont la puissance même, que les jedi ne sont plus qu'un vague souvenir qui doit finir par s'effacer. L'enfant d'une boule verte qui serait peut être destiné à monter les marches de la gloire. Peut être. Il y travaille.

Ils ne sont que les deux. Son impudence à lui répondre pourrait le mettre en colère. Mais non, il se contente de soupirer, secoue son visage doucement. « Je n'ai pas dis que j'avais besoin d'une mécanicienne mais que j'avais besoin de quelqu'un pour mon vaisseau. » Il redresse les épaules, fouilles dans ses poches à la recherche de quelque chose. « J'ai entendu la conversation avec ton supérieur... » Grimace légèrement. Il n'a cure des problèmes qui résident au sein de l'étoile noire. Objet de terreur et de convoitise. Désert de métal froid et trop loin de la terre ferme. Une arme galactique simplement utilisée pour terroriser les peuples, détruire des planètes. Tant qu'on ne touche pas à celle où se trouve les nids de nexus qu'il surveille depuis des mois, n'ayant pas encore trouvé le temps de s'y rendre. L'homme à la stature colossal qui cache la tendresse d'un cœur qui bat pour les boules de poils. On le voit déjà souvent avec son loth-cat, un nexu ne sera pas une surprise. Mais peut être que plus personne ne voudra se mettre en travers de son chemin désormais. Il finit par extirper quelque chose de sa poche et ouvre la main, dévoilant un petit hologramme de son vaisseau.

« J'ai besoin d'amélioration... » Ses agates qui se posent sur le demoiselle, un peu comme une demande, un requête. « Je paie bien s'il le faut... » Pas si avare que ça le sith. Il réclame toujours le meilleur, parce qu'il s'estime secrètement le meilleur. Il a besoin que son vaisseau tienne la route, trop de voyages ont eu raison de sa coque et de ses éléments. Il referme sa main sur l'objet. « Tu as quelqu'un à me conseiller ? » Puisqu'elle ne semble pas vouloir le faire, elle.