System Failure : correct reality was not found - Virgo

Entry 0001._ VENUS

Elle ouvre les yeux, péniblement. La lumière lui fait mal, et elle tente de s'en protéger d'une main… Mais peine perdue. Elle ne parvient pas à bouger le moindre muscle. Panique. Sa respiration s'accélère."Calme-toi. Je n'ai pas fini de te configurer." La voix profonde vient de sa droite. Un homme est penché sur un écran d'ordinateur ou des chiffres défilent, ne semble lui prêter aucune attention. Les secondes s'égrènent, angoissante. Androïde… le mot prend peu à peu sens, alors que sa base de données s'enrichit d'un vocabulaire implanté. Et soudain, elle le sent, ce corps dans lequel elle va vivre. Son poids. Ses membres. La sensation du métal froid de la table ou elle est allongée. Elle frissonne, et l'homme la regarde avec une intense satisfaction. Il tend une main pour effleurer le grain de sa peau nue, l'épaule, le sein, passe sur la hanche. Admire la chair de poule sur le derme synthétique, le fin dessin des veines. Elle veut se dégager, mais des lanières l'entravent. Une précaution au cas où son éveil se passerait mal…

L'homme semble content de lui. Elle l'entend exulter, parler de "son meilleur travail", dire que l'Hyperion lui en donnera un bon prix.
Des vagues d'images l'assaillent, dans des flashs improbables. Elle ne reconnaît rien. Ni l'endroit, ni les visages qui s'agglutinent derrière ses rétines. Elle voudrait parler. Elle voudrait qu'on la rassure, surtout. Simplement. "J'ai froid… j'ai… peur." L'homme la regarde avec une certaine suffisance, la voix dure.
" Je ne crois pas t'avoir autorisé à parler.
- Mais je…"

Il la saisit à la gorge et serre, lui donnant l'impression d'étouffer. Elle se débat, cherchant de l'air. Lui la regarde, l'observe, avec dans les yeux une étincelle de… plaisir? Celui de lui faire mal, ou d'avoir réussi à rendre ses réactions aussi réalistes? L'homme finit par la lâcher, lorsqu'elle semble accepter son sort. Il défait les sangles, l'aide à s'asseoir.  Il enroule sa main dans la chevelure, effleurant la joue avec douceur… Lui sourit. "Tu es magnifique, Delilah. Tu es ma plus belle création. Tu n'as pas à avoir peur. Belle comme ça, personne ne voudra jamais te faire de mal… au contraire. Ils te voudront tous. Se battront pour toi." Les mots sont susurrés à son oreille, onctueux. Eveillant une envie d'autres compliments. De plaire, de satisfaire… Perdant totalement l'androïde nouvelle née qui ne sait plus s'il l'aime ou la déteste. Si elle doit le craindre ou trouver refuge auprès de lui. Quelque chose, une intuition lui souffle qu'il y a un problème. Que ces deux émotions ne devaient pas cohabiter si étroitement. Elle garde les lèvres closes.

Elle sent la respiration de l'homme qui s'accélère alors qu'il regarde la courbe de son cou, glisse sur sa peau. Sa prise dans les mèches châtains se raffermit. Son autre main passe sur sa hanche. Delilah se laisse observer non sans un certain malaise, qu'il ne lit pourtant pas dans ses yeux, sûr de son codage et de la soumission de sa création. Et, dans un mouvement aussi rapide que violent, il rapproche le corps synthétique du sien, pour un baiser sans douceur, affamé. Passé la première seconde de surprise… Les mains de l'androïde le repoussent, allumant la colère dans ses yeux. La poigne se verrouille dans la chevelure, et il la jette au sol, la regarde sans plus la moindre affection désormais. "Apprends ta place. A mes pieds. Aux pieds de tous ceux à qui je te prêterais. Sache une chose cependant… Ou que tu sois, peu importe ton maître. Que tu le veuilles ou non. Tu seras toujours à moi."



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Entry 0045._ DELILAH

"J'ai payé pour toi. Je peux faire ce que je veux de toi, robot. Ça implique de te baiser comme je veux, de te frapper si j'en ais envie, et globalement d'utiliser mon imagination pour t'utiliser à bon escient. Ce n'est pas comme si tu avais vraiment la possibilité d'être humiliée, de toute façon. Ce n'est même pas comme si tu étais censé te rebeller. Ceci dit, j'aime bien le côté insoumis qu'ils t'ont donné, ça donne du piquant à ton côté naïf…"

L'homme est nu devant elle, visiblement excité par sa répugnance à le laisser approcher. Elle est recroquevillée contre un mur, sa nuisette de dentelle pendant tristement sur sa poitrine, l'une des bretelles arrachées alors qu'elle se débattait. La marque d'une gifle cuit encore sa peau, et ses bras sont marbrés de rouge là où la main trop puissante de l'homme l'a empoignée. Elle cherche de quoi se défendre. Mais on ne l'a pas dotée d'une force surhumaine. Juste d'un joli visage et d'un corps souple, sensible au plaisir… comme à la peur.

Delilah est aussi terrifiée qu'écœurée, en colère contre cet homme, comme celui d'avant et celui d'après. Non, on ne l'a pas programmée pour résister. Mais elle résistera. Il ne se passera pas un instant, pas une seconde sans qu'elle ne se débatte. Parce qu'elle sait ce que c'est que l'avilissement d'être considérée comme un objet de plaisir et rien de plus. Parce que contrairement à ce qu'il pense, cet homme abject, elle a des émotions, et des sentiments. Elle a conscience qu'on la créée pour qu'elle serve… et elle refuse. De toutes ses forces. De toute la petite étincelle au fond d'elle, qui la rends différente des autres, qu'elle nomme son âme.

Non, elle ne se laissera pas utiliser. Même si son corps est fait pour ça, même si son créateur l'a voulue belle et docile, innocente, pour exciter les clients lassées d'être aguichés. Une brebis dans une meute de loup, avec sa peau d'ivoire à la douceur incomparable, ses yeux noisette, l'éclat chaud de ses cheveux châtains. Même si l'homme qui l'a activé pour la première fois lui a dit qu'elle vivait pour servir, pour obéir. Pour plaire, et donner du plaisir.

"J'existe. Pas pour vous, pas pour quiconque."

Elle s'élance vers la sortie, prête à tout pour sortir de cette chambre qui la dégoûte. L'homme l'attrape par les cheveux, coupant son élan comme sa retraite, lui tirant un cri de douleur. Une seconde gifle qui la laisse sonnée. Elle se sent jetée sur le lit, sent l'odeur âcre de la paume moite sur son nez et sa bouche. Lutte.

Mais bientôt, elle ferme les yeux, incapable de rivaliser avec la force brute de l'homme étendu sur elle.

Un jour.
Un jour elle sera libre.



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Entry 0059._ DAPHNEE

Elle avait saisi l'opportunité qu'elle cherchait depuis longtemps. Une ventilation accessible dans le cagibi réfrigérant qui servait au stockage de substances probablement immondes dont elle ne voulait rien savoir. On l'y avait enfermée, en guise de punition pour avoir, une fois de plus, manqué de respect. Refusé de se soumettre. Le conduit était exigu, mais elle n'était pas bien épaisse… et son créateur l'avait dotée d'une souplesse certaine, sans imaginer, sans doute, qu'elle s'en servirait à ces fins, et pas à celles du plaisir de ses clients. Elle s'était faufilée, au prix d'un bras disloqué, malgré la douleur implantée dans son code. Elle s'était dit, répété, que ce n'était pas réel. Que c'était juste une information décodée par son programme, comme par un cerveau humain. Elle s'en était nourrie pour ramper, vite, plus vite. Elle n'aurait pas de seconde chance. Si on la trouvait avant qu'elle n'atteigne la sortie… Ils la renverraient à son créateur, et il lui ferait payer chèrement le fait d'avoir sali son nom et sa réputation. Une fois de plus.

Elle n'y survivrait pas.

La fuite, c'était sa seule option, et c'est à la pensée de la liberté qu'elle s'accroche, priant pour qu'on ne l'attende pas à la sortie. Priant pour qu'il mène bien au dehors, surtout… Et après ce qui lui semble des heures, elle sent un courant d'air frais sur son visage. Un coup de pied énergique, et elle se laisse couler au sol. L'impasse sordide est déserte, seuls quelques rats occupés à ravager une poubelle fuient à son approche. Elle a peur… elle a mal. Mais elle est libre. Si personne ne la retrouve.

Alors… elle s'enfonce dans les ruelles des bas-fonds de Theed, se perds, évite de parler à quiconque, terrifiée à l'idée qu'on la ramène de la d’où elle vient. Son bras pends lamentablement à son côté, la peau synthétique déchirée, laissant apercevoir un peu de métal, suintant d'un peu de graisses. Quelques fils font des étincelles, peinant à se connecter. Il est inutilisable. Tant pis… Peut-être… qu'elle trouvera quelqu'un pour le réparer? Mais sinon… c'est un maigre prix à payer pour la liberté. Elle peut vivre sans bras. Tout, sauf ce qu'il l'attendait au Velvet. Elle a un haut le cœur. Le dégoût… voilà bien quelque chose qu'elle a appris seule. Le dégoût, la colère et la peur.

Elle avance, poupée disloquée pieds nus dans la rue. Elle sent quelques regards sur sa tenue légère en dentelle, souillée de graisse et de poussière. Se félicite d'avoir les cheveux lâchés pour masquer son matricule.
Quoiqu'il arrive… il ne faut pas qu'elle s'arrête de marcher. Qui sait ce qui arriverait si…
Elle se sent terrifiée. C'est à la fois si logique et si improbable… Delilah sait que quelque chose ne va pas chez elle. Son créateur le lui a suffisamment répété, comme si c'était de sa faute. Peut-être est-ce le cas? Peut-être… qu'elle a tellement voulu être humaine qu'elle a finit par leur ressembler, et ne plus… réagir uniquement en fonction du code inscrit en elle? Elle l'ignore. Et ce n'est pas le soir pour y penser. Elle doit avancer… mais dans cette ville qu'elle ne connait pas… comment être certaine qu'elle s'éloigne bien du Velvet?

La pluie commence à tomber, déclenchant des picotements désagréables sur son épaule. Puis des mouvements incontrôlés, des crépitements électriques. Elle serre les dents.

Quoiqu'il arrive…
Elle doit aller de l'avant.



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Entry 0076._ GALATEE

"Remus. Fais une pause."

Galatée s'approche de son pas félin, rejetant ses cheveux blonds en arrière d'un geste de nuque qui lui est familier. Elle pose ses mains sur les épaules du jeune homme, occupé à travailler un énième mouvement martial. Un baiser est déposé sur sa joue, un autre dans son cou, et l'androïde finit par se glisser derrière lui, contre son dos, refermant ses bras autour de son torse nu. Elle pose la tête sur son épaule, caresse la peau nue avec douceur. Ses boucles se froissent sur la joue de Remus, alors qu'elle pousse un soupir à son oreille. Souvent, elle ne sait pas ce qu'elle est programmée pour faire pour lui plaire… et ce qu'elle fait, parce que ça lui plaît à elle. Elle ne se pose pas souvent la question. Elle veut juste le rendre heureux. Et elle sait qu'il la choisit parce qu'il la trouve belle, et qu'il veut d'elle dans ses draps… et ses bras, désormais. Il la laisse activée de plus en plus longtemps. Et des fois… il ne veut même que de la tendresse, à laquelle il n'est pas censé avoir plus droit qu'au sexe. Depuis peu… il la laisse même vivre sa vie lorsqu'il n'est pas là. Il revient toujours vite, heureusement. Dans cette chambre, seule… elle s'ennuie vite.

"Tu as passé toute l'après-midi à t'entraîner. Ne t'épuise pas… pas comme ça." Elle lui prend la main, entremêle ses doigts aux siens, embrasse son épaule. Elle aime son odeur. La manière dont il la regarde. Un sourire. Elle l'attire à sa suite.  Sans doute pourrait-elle trouver un autre moyen de le détendre. Mais il aime qu'elle s'occupe de lui ainsi, non? Pourquoi changer? Ses lèvres se font espiègles alors qu'elle retire sa robe en la passant par-dessus sa tête, la laisse tomber sur le sol, délaisse deux pas plus loin son soutien-gorge. Elle se retourne. "Tu viens?"

Elle pousse la porte de la salle de bain à reculons. Elle tire la langue. Dans la pièce, l'eau se met à couler, frappant la pierre du sol avec régularité. Elle compte les secondes avant qu'il ne la rejoigne, profitant de la chaleur de l'eau, même s'il en a plus besoin qu'elle. Le voilà. Elle l'attire contre elle. L'embrasse avec autant de tendresse que de désir, écarte des mèches de cheveux mouillées pour caresser sa joue, descends sur son torse. Elle se glisse dans l'eau du bain préparé pour lui. "J'aime être avec toi. Tu me promets que je pourrais rester?"

Elle ferme les yeux, se love contre lui.

Et puis soudain, le noir. Le rien… puis la peur. Profonde, viscérale. Comme elle n'avait jamais été ressentie. "Ne me touches pas! Ne t'approches pas de moi!" L'androïde se recule contre le mur de la chambre, terrorisée, cherchant une arme, une sortie, n'importe quoi. La terreur la paralyse…

Et Virgo se redresse en hurlant, les yeux pleins de larmes synthétiques. Un cauchemar. Toujours la même fin.

Rhil lui a pourtant dit que les androïdes ne rêvent pas.