La BSI ne dort jamais vraiment, il y a toujours des agents désignés chaque semaine pour assurer la veille et qui doivent se rendre disponibles à toute heure de la nuit ou du week-end pour intervenir en cas de besoin : intrusion dans les systèmes, failles, bug ou de façon plus pragmatique, apporter une aide technique aux différents agents qui sont déployés partout et qui à chaque instant peuvent avoir besoin d’un soutien. Les astreintes tournent, mais ils sont peu à pouvoir les assumer et une fois n’est pas coutume, c’est Anasha qui se retrouve à devoir s’occuper d’une partie de la veille. Elle déteste ça : non pas que travailler sur ses heures ou jours de repos la dérange vraiment. Non, ce qui l’ennuie c’est que, dans le meilleur des cas, tout se passe bien. Dans le pire, il faut être réactif très rapidement et arriver à endiguer seule les problèmes jusqu’à ce que le reste de l’équipe soit à son tour prête à intervenir. Mais, ce soir, elle n’a personne à retrouver, alors elle a trainé plus longtemps que d’habitude au bureau afin de vérifier l’intégrité des différents serveurs et pare-feu avant de se décider à enfin quitter le bureau. Elle coule, comme à chaque fois que Kolovish est en mission, un regard vers le ciel et observe les premières étoiles que l’on distingue déjà. Une petite pensée pour l’homme avant de reprendre sa courte route vers la caserne.
L’alarme la tire de ses pensées. Elle se penche vers l’holo qu’elle a toujours en main et lit rapidement les rapports qui s’affichent et s’enchainent furieusement sur l’écran. L’intrusion est physique et après quelques recherches, elle trouve même le point d’accès. Pour gagner du temps – plantée où elle est au milieu de la rue, elle ne peut pas faire plus – elle envoie quelques lignes de codes destinés à retarder l’intrusion avant d’envoyer un message destiné aux autres techniciens. Viendra qui pourra quand ils pourront… Anasha retient la bordée de jurons qui lui brûle le palais et fait demi-tour au pas de course. Ses codes lui offrent une brève pause de quelques minutes à peine, le temps de rejoindre les bâtiments du BSI et remonter rapidement les couloirs. Quelques coups d’œil sur son terminal lui permettent de suivre les avancées de l’intrusion. Alors Anasha, un sourire au coin des lèvres, s’arrête un instant. Pour reprendre sa respiration d’une part et pour, parmi les données volées, y lancer un petit virus espion discret qui permettra de traquer l’intrus. Elle n’a pas le temps de faire plus complet et plus élaboré en si peu de temps (et pour le commun des mortels, si la performance n’est pas incroyable, elle reste tout de même peu anodine, il faudrait être réellement formé pour repérer le parasite qui vient d’infiltrer les données.)
Vient maintenant le dilemme. Anasha n’a qu’une formation militaire de base, quelques heures à son comptant au tir, possède des bases pauvres de combats rapprochés. Mais c’est avant tout et surtout une technicienne, de ceux qui restent dans l’arrière et qui ne vont jamais au front. Celui ou celle qui a osé entrer dans les bâtiments du BSI n’est pas là par hasard, et si elle en croit ce qui s’affiche sur son écran, est à la recherche de quelqu’un ou de quelque chose de très précis. Finalement, elle décide de tester son adversaire sur le terrain qu’elle maîtrise le mieux. Certes, la soirée le prouve, les défenses physiques du BSI ne sont pas optimales. Celle du système, par contre… Un rictus tord brièvement ses lèvres.
Elle pousse la porte d’un petit bureau, rallume une machine qu’elle déconnecte dans un premier temps du système quelques minutes : assez pour coder des défenses basiques et solides. Une fois reconnectée au réseau, elle hésite un instant avant de taper : Nous vous voyons. et d'envoyer le message qui doit maintenant s'afficher temporairement sur l'autre terminal. C’est un avertissement amusant, une piqûre de rappel : ici, quiconque tente de s’introduire doit savoir que c’est dans son domaine. Son terminal en main, elle attend de recevoir dans la foulée les consignes éventuelles de ses supérieurs. Puis, Anasha se relève et s’autorise une brève pause des écrans pour aller récupérer les armes conservées en cas de besoin dans un renfoncement du mur ainsi que les munitions adéquates. Au fond d’elle, la jeune blonde espère qu’elle n’aura pas à gérer elle-même et de cette façon l’intrusion, mais si d’ici quelques minutes, elle est toujours sans instructions, elle devra prendre elle-même la décision de ses initiatives. Et ça ne la réjouit vraiment pas.