unnatural selection » tadjedine.

it's bugging me, grating me,
and twisting me around.
@Tadjedine Shaetris

Les pannes au sein de la station se multipliaient quotidiennement depuis plusieurs sans qu’on ne sache réellement pourquoi. Était-ce de l’obsolescence programmée ou quelqu’un s’amusait-il à leur mettre des bâtons dans les roues ? C’était difficile de le savoir mais en attendant il fallait bien que quelqu’un répare les dégâts pour assurer le bon fonctionnement de la zone de vie. Icarus parmi tant d’autres s’était immédiatement portée volontaire, enchantée par la perspective de passer un peu de temps à l’extérieur. À force de rester enfermée et de répéter les mêmes gestes mécaniques en permanence, elle avait tout du lion qui tournait en rond dans sa cage. Prendre l’air, sentir le soleil sur sa peau et croiser de nouveaux visages n’était pas pour lui déplaire. Elle avait toujours eu la bougeotte et le sentiment s’était considérablement accentué ces dernières années, peut-être par ennui ou par lassitude, elle l’ignorait. Quelque chose en elle résonnait comme une évidence pourtant à chaque fois qu’elle pensait enfin comprendre, la pensée s’évanouissait aussi vite qu’elle était arrivée. Sa situation n’était pas nécessairement désagréable, toutefois, elle rêvait souvent de partir vers l’inconnu pour tout recommencer à zéro. Pour l’heure elle n’en avait pas le courage et ses obligations auprès de l’alliance ainsi que des mouvements rebelles androïdes la retenaient fermement sur Naboo. Après avoir pris ses instructions, elle passa dans sa cabine pour troquer la blouse de travail pleine de cambouis contre une tenue plus ample. La mission était simple (ce n’était pas vraiment une mission d’ailleurs, il s’agissait tout bonnement de faire des courses) : elle devait ramener du matériel et si possible en échange d’un prix raisonnable. Icarus le savait d’avance, ce ne serait pas une mince affaire car ce type denrées spécifiques étaient difficiles à obtenir. Un certain nombre de vendeurs voyaient d’un mauvais œil les personnes de son genre et en profitaient pour se faire une marge considérable en refusant toute négociation. Quoi qu’on en dise les siens n’avaient pas bonne réputation et continuaient pour la plupart à être asservis. Ils avaient été naïfs de croire que l’Empire prendraient en considération leurs doléances ; rien n’avait chanté tout restait figé. À ceci près que beaucoup étaient désormais prêts à en découdre, elle y compris. Ce trop-plein d’injustices lui faisait horreur à l’instar du spectacle désolant que l’arène offrait au commun des mortels par pur divertissement sordide. Ils étaient certes des machines néanmoins ils n’étaient pas tous insensibles surtout si on les avait dotés du minimum émotionnel dans le but de les humaniser. Cette idée la fit frémir de rage tandis qu’un bruissement de pas reconnaissable entre tous coupait cours à ses divagations intimes. Elle se redressa aussitôt et ferma la malle où elle avait entassé ses rares effets personnels puis elle compta jusque cinq avant que Tadjedine n’apparaisse dans l’embrasure de la porte. « Je n’ai pas le temps. » Qu’elle commença sans préambule en évitant de son regard pour échapper à toute tentative de corruption de sa part. Encore aujourd’hui elle ne comprenait pas quelle mouche l’avait piqué de vouloir servir de « chaperon » au garçon. Enfin c’était ce qu’elle se disait quand il débarquait au pire moment... Au fond d’elle, A-2 avait fini par s’attacher à lui un peu comme on chérissait un frère ou un enfant. Il n’avait qu’un défaut – deux en réalité, celui de poser trop de questions et d’être extrêmement bavard. C’était à se demander comment il avait pu la dérider quand elle accordait sa confiance à peu de monde voire à personne. « Je dois aller récupérer du matériel pour l’alliance, je suis déjà en retard. » Ni faux, ni vrai, on ne lui avait donné aucune deadline précise si ce n’était de faire au plus vite. « Soit tu m’accompagnes soit on se verra après. » Étonnée par sa propre proposition, elle ronchonna intérieurement et prit les devants sans lui donner l’opportunité de tergiverser pendant longtemps.

Girls like her were born in a storm. They have lightning in their souls. Thunder in their hearts. And chaos in their bones.
-- @icarus a-2

"Encore ?" Les talonnettes font chanter le couloir malgré sa démarche vaporeuse. Il a les mains filées dans le dos et les doigts se tiennent sans se presser, font distraitement glisser les bagues autour de ses phalanges. Tadjedine serait élégant dans ses broderies si la mine n’était pas aussi fermée par le soucis qui lui fait une ride au dessus des sourcils. "Il vaut mieux remplacer les plaques ablatives, on ne peut pas faire l’impasse sur le carbone pour protéger le vaisseau." Le museau se baisse vers son interlocuteur, un pyke patibulaire bavard uniquement lorsqu’il faut gueuler. Il ne le regarde même pas, se contente de passer en revu les pièces endommagées par la poussée solaire. Ses gestes sont cadencés par l’agacement sur le pod minuscule qu’il tient entre ses trois doigts. Le gosse ne dit rien de plus, préfère garder le silence et la raison est simple : tout Palawan qu’il est, aucune légitimité ne lui est allouée quant aux process à suivre lorsqu’une éruption solaire vient foutre en l’air la taule de l’engin qui les porte en son ventre. Du reste, il n’y connait que ce qu’Atlas et Aziel lui ont appris, n’a brodé leurs mots qu’aux observations et aux bricolages glanés et assimilés sur Nar Shaddaa. L’autre le sait et à raison ne prête pas d’attention au cabri qui promène ses yeux immenses sur le couloir immaculé. Il essaie de faire sérieux, pourtant, d’être digne de ce que l’on attend désormais de lui. Il essaie de rattraper les années à se vautrer en lui-même, dans ce qu’il a pu faire de plus pathétique et de plus indigne. Il essaie de se faire aux choses ; surtout à lui-même.
Leur chemin se sépare après un geste agacé du pyke qui vraisemblablement n’a pas envie de s’embarrasser d’un gamin sorti de nulle part à qui l’on accorde désormais un peu trop de confiance. Un moment, Tadjedine observe la porte qui s’est refermée sur le dos de la créature. Il est sage et la bouche scellée de silence. Puis, doucement, son regarde vaque à la vitre qui donne sur le rien. Quelques centimètres à peine entre son nez et le vide de l’espace. Au loin, les étoiles et leurs scintillements. Se dit qu’il en a vu certaines. Sur la base c’est jamais vraiment le jour ni tout à fait la nuit. Il devine les matins jeunes lorsque l’orbite du vaisseau traverse la trajectoire de l’astre solaire, la nuit qui tombe et fait une ombre sur la courbe de Naboo. Il y a des choses qu’il connait d’avant, de ses enseignements militaires et d’autres, plus prêtées aux rêves et parfois plus techniques, racontées comme des histoires par l’androïde qui fait de son quotidien quelque-chose d’autrement plus doux que ce qu’il n’aurait pu imaginer. Un dernier coup d’oeil vague au silence du noir, et Tadjedine tourne ses talons en poussant un petit soupir.

Bien sûr, il n’a pas dans la tête de quoi solutionner les soucis mineurs ou majeurs qui semblent se déclarer de plus en plus fréquemment au sein de l’entité de métal et ne prétend pas davantage pouvoir être acteur de leurs résolutions, pour autant le nez aime être mis partout et le gamin ne demande qu’à apprendre. Alors il a le sourire flanqué aux lèvres, lorsqu’il conduit sa carcasse dans les échancrures des couloirs, poussé par sa petite idée d’aller réclamer l'attention de celle qui l’a pris sous son aile dans un élan qu’elle peine à lui justifier lorsque l’envie l’en prend de la titiller. Mais toute râleuse soit-elle, Icarus reste sûrement la plus qualifiée du vaisseau et il lui semblerait presque qu’il ait un faible pour les androïdes aux têtes bien faites. Ses pensées trainent sur celui qu’il a hâte de récupérer le soir-même, coincé pour le moment en salle des machines. L’apprenti souffle, balaie l’imagine d’un plissement de nez. Ses pas s’accélèrent dans un énième corridor aseptisé. Mais celui-ci est plus reculé que les autres, l’emmène là où il sait qu’elle traine ses circuits. Une chambre, si elle lui sert, au moins un endroit à elle dans lequel elle peut se défaire de ses journées bien remplies. Tadjedine se demande à quoi elle s’occupe lorsqu’elle n’essaie pas, de son temps libre, de se débarrasser du môme qui l’a prise en amour.
Il sait qu’elle l’a entendu. Il devine aussi son air, le voit dans la façon dont elle se redresse, toute droite mais sans précipitation. Ca le fait sourire. "T’es rude." Il gronde doucement. "Pas le temps pour quoi ? Pour moi ?" Qu’il fait et le timbre est plus apaisé que son regard bonimenteur. Après un instant d’hésitation (pour la bienséance) il s’élance dans la pièce, brise la distance pour réclamer son regard qu’elle lui refuse. Icarus est belle. Elle l’est davantage quand elle fait la gueule et lui assène des regards agacés. L’androïde ne s’en était jamais caché, dès le premier jour. Ca l’a amusé, lui, cet espèce d’entêtement à lui faire comprendre à quel point il était pénible sans toutefois savoir s’en débarrasser. L’affection c’est comme ça, il se dit. Parfois c’est juste là, logé entre les deux poumons, et ça ne s’en va qu’à grand coups de pioche dans le coeur. "Je t’accompagne." Il n’hésite pas. La regarde déjà s’en aller alors qu’il la talonne comme un gamin. "Je devais sortir acheter quelque-chose, de toute façon." Oui, de la viande séchée au piment, pour Atlas. Parce-qu’il n’y en a plus, parce-qu’il sait qu’il aime mâchouiller ça pendant des heures, distraitement, le soir. "J’ai besoin de quelqu’un pour me protéger." En soupirant, il lui glisse une main à l’épaule. "Tu pourrais me dire bonjour, quand même."

» brennisteinn. (tadjedine)
» the lost tomb (Tadjedine)
» dissolve the night (tadjedine)
» ❝ I observe more than I speak ❞ ft. Tadjedine Shaetris